Moi, quand j'ai connu la musique
Intervention de Paul Laurendeau sur le site “Écouter lire écrire"
“Le premier paragraphe du présent poème a été écrit au siècle dernier par Gilles Vigneault. Mon intervention à la Jean de Meung forme le second paragraphe du poème, sans cependant, ici, rallonger à l’excès.
Qui nous enverra le troisième tableau de cette tapisserie sans fin ?”
Moi, quand j’ai connu la musique,
J’avais dans les cinq ou six ans.
Elle était en habits rustiques.
Elle avait le soulier dansant.
Était venu avec les gens
Et traversé les Atlantiques
Connu les pluies, connu les vents
Et découvert les Amériques.
Battu les quais, battu les ponts,
Et n’avait pas perdu son nom
S’appelait encor Rigodon,
Quadrille et Gigue et Cotillon.
Moi, quand j’ai connu la musique,
Elle était vêtue en violon.
Or, chaque fois que le violon
Retrouve le parler rustique
J’écoute alors, sans accorder,
Sans battre des mains ni des pieds…
Comme on fait quand c’est la musique.
Moi, quand j’ai connu la musique,
J’avais dans les quinze ou seize ans.
Elle avait la hanche érotique.
Elle portait des bas brillants.
Jaillissait des corps trépidants
Comme une puissance électrique
Sur les planchers lisses et luisants
Des grands dancings de l’Amérique.
Elle était née Révolte et Bruit
Et n’avait pas perdu ce rôle.
S’appelait encor Jazz, Country,
Rythm’n Blues et Rock n’roll.
Moi, quand j’ai connu la musique,
C’était la guitare électrique.
Or, chaque fois qu’en trois accords
Crie cette fée psychédélique,
Ébloui, je l’écoute encor,
Sans faire trépigner mon corps…
Comme on fait quand c’est la musique.
mai 2011
Quand j’ai connu la musique (1)
Pour Paul Laurendeau
Moi quand j’ai connu la musique
J’allais piano sur mes onze ans
Elle avait un port angélique
Elle ouvrait des mains de plein-chant
Elle avait traversé les âges
Sans attraper aucune ride
De Dieu elle portait témoignage
De la nef jusque dans l’abside
Anges volant dans les ogives
En volutes d’alléluia
Notre foi devenait captive
Des agnus et des gloria
Moi quand j’ai connu la musique
C’était des voix à l’unisson
Oui! Notre âme avait des frissons
Au chant du grégorien magique
A laudes, à vêpres ou à matines
Mon coeur dansait dans ma poitrine
Comme on fait quand c’est la musique
Quand j’ai connu la musique (2)
Pour Paul Laurendeau
Moi quand j’ai connu la musique
J’étais encore un tout petiot
Elle avait les doigts poétiques
Mon grand-père jouait du piano
C’était les valses de Chopin
Des mazurkas des impromptus
De la musique à baldaquin
Quelque air d’opéra rebattu
C’était Masques et Bergamasques
Des entrelacs de chèvrefeuille
Ou quelque mélodie fantasque
Sur la partition qu’on effeuille
Moi quand j’ai connu la musique
On écoutait l’ORTF
Sur le poste, où quelque grand chef
Nous étourdissait de classique
Mon âme volait dans l’azur
Mes deux mains battaient la mesure
Comme on fait quand c’est la musique
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